La Grande Eau

« Le mur entourait l’orphelinat comme une couleuvre cachée. Énorme. Si elle t’enlace, elle te prend avec sa queue et il n’y a plus de fuite possible. »

Deux enfants, Lem et Isaac, vivent dans un orphelinat cerné de murs montant jusqu’au ciel. Ils tentent d’apercevoir à travers un trou du mur la Grande Eau, symbole pour eux de toutes les libertés. Nous sommes au lendemain d’une guerre, dans un établissement régi par quelque dictateur, sans autre espace laissé à l’imaginaire que ce trou, qui canalise espoirs, paroles et prières.

Lem nous raconte ce cauchemar éveillé, frénétiquement, comme s’il n’y avait pas de lendemain, comme si les adultes ne pouvaient les croire, comme si tout était trop irréel pour être vrai. Les enfants rêvent que la Grande Eau se rapproche, absorbe les étoiles, qu’elle les embrasse et les enveloppe comme une mère en recouvrant tout sur son passage. Mais peu à peu, les murs se recouvrent de lettres rouges, le ciel devient de flammes, le vent rouge emporte les étoiles, et la sécheresse menace.

La prose répétitive et incantatoire de Živko Čingo déchire la norme, perce le cœur, et transcende d’une manière hallucinée la malédiction de Lem et d’Isaac.

Texte de Živko Čingo
Traduit du macédonien par Maria Bejanovska
Dessins de Giovanna Ranaldi
Collection Calques
Prix Nocturne 2014
978-2-37100-029-2 – 224 pages – 16€

 
 

 
Živko Čingo (prononcer Jivko Tchingo), né en 1935 à Velgochti, en Macédoine, et mort en 1987, s’est consacré — hormis deux récits qui se suivent, Les Neiges argentées, La Grande Eau, et des romans jeunesse — à l’écriture théâtrale. Comparé à Isaac Babel pour la vivacité du regard qu’il porte sur la période post-révolutionnaire, Čingo offre un témoignage historique de la répression totalitaire. La Grande Eau, traduit en anglais, en russe, en serbe et en français, fut adapté au cinéma en 2004 par Ivo Trajkov sous le titre anglais The Great Water.
 
 

 
Née à Prilep, au centre de la Macédoine, et grandie à Skopje, puis en Serbie, Maria Bejanovska entreprend une carrière de journaliste, parallèlement à ses études de philologie romane qui l’amènent à la Sorbonne en 1964, où elle lit Aucassin et Nicolette en vieux français. Correspondante du quotidien Nova Makedonija et de la Radio nationale macédonienne, elle travaille un temps au centre culturel yougoslave de Paris, puis à RFI, où elle finit par se voir proposer sa propre émission, « L’Autre Europe ». Au début des années 80, elle se donne un an, suite à un pari avec un ami, pour trouver un éditeur français à Western Australia, de Božin Pavlovski, qu’elle finit par traduire elle-même ; mais c’est son coup de foudre pour le texte La Grande Eau, de Živko Čingo (prix Nocturne 2014), qui détermine sa carrière de traductrice. Elle a traduit une trentaine de romans, recueils de poème et pièces de théâtre parmi lesquelles des sommets visionnaires d’onirisme et de noirceur (La Porte secrète, de Miroslav Acimovic, La Graine noire et Le Cheval rouge de Taško Georgievski, Sorcière, de Venko Andonovski, La Bosnienne, de Vidosav Stevanović, etc). Maria a aussi été basketteuse, handballeuse, et actrice dans deux moyens-métrages.
 
 
 
 

Giovanna Ranaldi a eu une révélation enfant en découvrant les sculptures de Henry Moore. Diplômée de l’institut d’art de Rome et de l’école Parsons à New York, un temps restauratrice de tableaux, elle enseigne et réalise des performances de théâtre d’ombres. Elle a publié un somptueux Petit Poucet en bichromie (Pulgarcito, éd. Milimbo), Musica (éd. Artebambini) et Une toute petite chose (éd. Passepartout) (http://giovannaranaldi.blogspot.it).
 
 

 
“Un conte au lyrisme noir irradié par l’amitié de deux orphelins, où un enfant au rire invincible initie son ami à la force du rêve. Les saisons, la rigueur du climat, le froid glacial, la tempête tissent une trame météorologique qui soutient le flux tendu de l’écriture.”
Frédérique Fanchette, Libération

“On peut aujourd’hui redécouvrir cette ténébreuse fable d’apprentissage, dont l’onirisme de la langue et la fulgurance des images écrasent tout discours attendu.”
Baptiste Liger, Lire

“Un roman perturbant.”
Didier Garcia, Le Matricule des anges

« Véritable texte d’enfance, habité par une voix extraordinaire qui saisit toute l’affectivité qu’un regard d’enfant peut contenir, empreint d’une naïveté qui est la seule réponse à tout ce qu’il y a de machiavélique, de planifié, de préformaté dans le regard adulte. »
Nikola, sur Paludes

“Živko Čingo transforme en une poignante et poétiquement déroutante fable enfantine les drames de la mise en place d’un totalitarisme sous pression, au début de la Guerre Froide.”
Hugues Robert, librairie Charybde

“Ce roman, véritable ‘trésor oublié’, est une fable poignante et déroutante sur fond de totalitarisme aux débuts de la Guerre Froide. Un crève-cœur !”
Librairie Mots et Cie (Carcassonne)

“Texte de funambule, équilibre précaire mais tenu, entre deux univers qui ne devraient jamais se croiser : celui, carcéral, d’un orphelinat d’un pays de l’Est, et celle de la liberté, qui malgré toutes les violences, les humiliations, les mensonges, s’insinue, coule, envahit les esprits. Ces deux atmosphères et leur contamination réciproque, font toute la chair de ce texte, insolite, poétique et politique.”
Librairie Le texte libre (Cognac)

La Grande Eau est plus une œuvre de poète que de romancier, une eau-forte plus qu’un témoignage. Un livre d’inspiration insolite ou fantastique.”
RongeMaille, libraire du Triangle masqué

“Très beau et très joli (magnifiques illustrations) livre dont la force poétique fait que ce texte reste, vous hante…”
Aurélie Jardel, librairie l’Autre Rive (Toulouse) dans Le Temps des libraires sur France Culture

“Puissance du rêve, puissance des mythes de contrebande. Puissance de la Grande Eau. Puissance de la vie bonne, chaude, pulpeuse et rayonnante.”
Coco Patraque, salon-litteraire.com

“Un très beau récit sur la détresse mais aussi le pouvoir de l’imagination chez l’enfant. L’auteur est un magicien des mots.”
Paolina, Le monde de Mirontaine

“La Grande Eau que l’on peut apercevoir si on arrive à regarder à travers les murs. Métaphore magnifique de ce que peut être la liberté et son désir. Živko Čingo nous offre en la personne de Lem, un héros et un narrateur à la langue étonnante, avec ses mots à la fois brutaux et poétiques.”
Gringo Pimento, Addict-culture