Sommaire analytique

Nous publions la version traduite du sommaire analytique réalisé en 2010 par Marco Trainito et diffusé gracieusement. Les pages renvoient à l’ultime édition de Rizzoli.

 

Première partie

[A] Au soir du 4 octobre 1943 le marin (nocchiero) de la défunte Marine royale ‘Ndrja Cambrìa arrive au pays des Femmes en Calabre [Bagnara], et contemple le Détroit ainsi que la Sicile, où se trouve Charybde, son pays natal. [Il évoque alors le paysage et quelques premiers personnages.]

[B] Analepse : retour sur les quatre jours de voyage depuis Naples, et en particulier sur :
(b1) • la rencontre, en haute Calabre, avec les feminotes du jardin de Praja, lesquelles, chose inédite, détournent leur route habituelle vers le sud et la Sicile (où elles prélèvent du sel de contrebande) pour se diriger vers Naples à la recherche d’un homme qui pourrait, s’il faisait l’amour à l’une d’entre elles, pourrait la libérer du sort où elle est tombé du fait de n’avoir pu consommer son mariage, son mari ayant été mobilisé. Leur cheffe Jacoma tente de convaincre ‘Ndrja de soigner sexuellement sa belle-fille ensorcelée, Cata. Les éclaircissements de Peppinegaribalda sur l’histoire de la belle Cata, qui urine dans les têtes de Mussolini sculptées dans la craie dorée pour signifier le temps de sa fin par le ramollissement et la destruction de la craie. L’arrivée de Boccadopa, Potempedocle, Montalbanodelicona et Pietraliasottana, eux-mêmes mutilés de guerre (Boccadopa a une jambe de bois et il profite du faible Portempedocle, qui l’aide à toute chose). La complainte (tribolo, tribule) au sujet des ferries (ferribò) : le féminotes se rappellent les temps heureux des voyages sur les ferries et de la contrebande de sel, et dans une funèbre plainte, elles jettent leur tribule cru au sujet des ferriboîtes (ferry-boat) qui, avant d’être détruits par la guerre, n’étaient pas seulement pour elles un moyen de transport mais aussi leurs amants : elles étaient en effet parfois possédées sexuellement par derrière par d’anonymes machinistes dans les salles des machines, et elles ont toujours préférer penser que c’était le bateau personnifié qui les aimait (7-46).

(b2) Après à la rencontre avec les féminotes, l’élection de ‘Ndrja comme Moïse par le groupe des mutilés en route pour la Sicile. [46-51]

(b3) La rencontre avec les deux féminelles (femminelle) d’Amantea, la mère et la fille d’un certain Sasà Liconti : devenu fou, misérable et maltraité par les Anglais, il reste à Cannitello, en face du Détroit, et rêve de la traversée, tout en montrant une mystérieuse photographie aux passants ; c’est la raison pour laquelle les deux femmes vont et viennent pour lui apporter des changes de vêtements. [52-68]

(b4) La pénible et inutile recherche d’informations sur la traversée à une population réduite à la misère et à la folie par la guerre, qui présente toutefois bonne figure de circonstance ; souvenir par association de son enfance, où Duardo et lui cherchaient un magasin de bonbons et reçurent information de la part d’une femme qui veillait son fils mort, lequel était étendu avec dignité allongé sur un petit catafalque, avec la petite médaille de sa première communion et une épée de fer blanc entre les main. [68-73]

(b5) La rencontre avec le pêcheur « descendu de bateau et monté à cheval » qui après avoir rêvé que le mer était devenue un désert de neige et de glace, se trouve contraint de transporter une fère sur le dos de l’animal, un dauphin sans queue ni tête, ainsi que des bidons d’eau de mer, qu’il écoule respectivement pour du thon et un purgatif ; en effet les Allemands ont fait de sa barque un cercueil pour soldats italiens. [74-81]

(b6) Première rencontre avec les fères : des carcasses sur le plage du Golfe de l’Air et passage nocturne d’un banc au large. [81-83]

(b7) La rencontre avec le soldat-plagier, le Griffon à la langue et l’oreille bien pendues, habillé de lambeaux de tenues de toutes les guerres (de sorte que qui le trouve mort le reconnaisse et l’honore comme un soldat de n’importe quelle armée), qui le renseigne sur la nature « férine et divine » des féminotes, sur la manière dont elles traitent la viande de fère et comment il faut s’y prendre pour les séduire pour obtenir d’elle un passage ; il fait également l’éloge du vudesyeux (vistocongliocchi) contre l’entendudire (sentitodire), tandis qu’il creuse un lit-cercueil dans le sable dans l’attente de la mort. [83-115]

[C] Réflexions de ‘Ndrja sur son rôle de Moïse pour ses compagnons, alors qu’ils passent par les paysages rocheux du Pays des femmes, quand Portempedocle dans l’obscurité lui crie « Mooooïse… Mooooïse ». [115-119]

[D] Effluves pestilentielles, due aux fères cuisinées à la goulotte (ghiotta) infestent le Pays des Femmes ; première évocation de la théorie de Mimì Nastasi sur la descendance communes des fères et des féminotes aux sirènes ; alors que ses compagnons sont accueillies par les féminotes ‘Ndrja se débat dans l’ossuaire des fères et trouve une sinistre analogie entre le sable noir de la marina féminote et les cimetière des Colerosi (cimetière de Naples, aujourd’hui abandonné). [119-128]

[E] Digression sur la naissance et sur le mystère de la mort des fères trentenaires. [128-131]

[F] Analepse sur les visites à Cariddi du professeur de Messine qui dédia toute sa vie à la vaine recherche des mystérieux œufs d’anguilles. [131-132]

[G] Le rêve eschatologique les yeux ouverts sur la mort volontaire (des dauphins vierges et martyrs) dans le ventre de Vulcano des fères trentenaires, puis rêve les yeux fermés de la réaction négative des vieux pelisquales de la bonnenouvelle portée par un ‘Ndrja efféminé de retour de la guerre. [138-153]

[H] Réveil et souvenir de :
(h1) Le casobel “dauphin contre fère” de 1935 avec l’Excellence fasciste qui, depuis son bateau, oblige d’abord les pêcheurs caréduits de relâcher la fère qu’ils avaient capturée et dénoncée par vengeance, puis leur impose de l’appeler “dauphin” et de l’adorer comme un jeune homme divertissant, élégant, beau, pur, vierge et martyr, pour finalement jouer au tir à la cible et décharge dans la tête de l’animal les six coups de son mousquet. [153-185]
(h2) Le casobel “dauphin contre fère” de l’août précédent sur une corvette avec le le garde-côte monsieur Monanin, un Vénitien trouillard qui se prostitue en femme au Cap Tarantino et qui maltraite linguistiquement les pêcheurs comme ‘Ndrja et Crocitto en les obligeant à appeler du terme efféminé italien “dauphin” l’animal qui pour leur dialecte et dans leur vie n’a jamais été autre chose que la “fère”. [185-219]
(h3) Le récit de Monanin de la fable du guitariste grec (mythe d’Arion) et de l’histoire de l’amitié entre l’enfant de Baia et le dauphin [209-211] ; cette histoire rappelle à ‘Ndrja le souvenir de l’amitié entre la jeune fère Mezzogiornara et son père Caitanello quand il était enfant. [224-236]
(h4) Le rêve du bateau fantôme avec l’Excellence qui joue au tir au pigeon avec les dauphins et Monanin qui, les sortant de son vente, les photographie en plein vol [237-240] ; c’est Mezzogiornara maintenant qui est la cible de l’Excellence [241] ; dans son rêve, sa mère enceinte apparaît, prépare le stomatique d’os de fères réduits en cendre et les mélange avec le miel pour lui, qui se voit lui-même au lit comme s’il était le père jeune gamin dans l’histoire de Mezzogiornara. [241-243]

[H] Le réveil après les souvenirs et le dormiveille et la prise de conscience du signification du rêve de la mère et de Mezzogiornara. [243-245]

[I] Le grande bouffe de fère à la goulotte de Portempedocle, et réflexion de ‘Ndrja sur la fère comme l’affamanne, c’est-à-dire source de faim et de manne ; (245-255;étymologie de disqualifiée, hommes à la peau et à au caractère semblables au squadre, c’est-à-dire le requin (le squale), là où squaddrare signifie d’abord poncer le bois au papier de verre (squadro).

[J] Du crâne de fère sur la plage à son cerveau et la manière dont s’en nourrissent féminotes et pélisquales. [255-262]

[K] La fère comme phénomène naturel que les pélisquales savent ne pas savoir.[262-264]

[L] L’apparition nocturne des féminotes qui s’apprêtent au départ. ‘Ndrja les écoute caché tandis qu’elles parlent de l’usage qu’elles font du vin allemand. [264-271]

[M] Boccadopa et Portempedocle s’écroulent sous l’effet de la mixture de vin et les féminotes, qui ont aperçu entre-temps ‘Ndrja faire semblant de dormir, font route dans la nuit vers la Sicile. [271-275]

[N] Ndrja décide de laisser le Pays des Femmes mais rencontre Ciccina Circé, laquelle lui offre un passage. [275-283]

[O] La traversée du détroit et les mystères de Ciccina Circé : le sort enchanteur (les fères envoûtées par la clochette à sa proue) ; la séduction ; la mort et les cadavres du détroit que la femme balaie avec son cortège de fères) ; les monologues et les dialogues avec son alter-ego : Baffetuzzi ; commisération des douaniers fossoyeurs ; la halte vers Scylla et le dialogue sur la guerre et la valeur militaire ; l’histoire du signaleur Pirri Capo qui se retira la vie au lieu de la consigner aux allemand, à Naples ; la guéguerre amoureuse ; encore Baffetuzzi et son départ pour la guerre de Mussolini ; les fères libérées de l’enchantement de la clochette ; la fuite concédée à Ciccina par la sirène du sous-marin ; à proximité du rivage ‘Ndrja s’endort vaincu par la fatigue et se réveille sur la rive devant sa maison de sorte qu’il n’a pas pu voir le dernier mystère de Ciccina : l’abordage. [283-325]

[P] Le dédommagement en nature : ‘Ndrja et Ciccina s’accouplent sous les palmiers [326-333] ; les prédictions de Ciccina : malheur à ‘Ndrja et aux autres à cause de lui si la guerre l’a rendu non pas fourbe, comme il veut le faire croire par les mots, mais innocent et pur, comme il se révèle par les faits. Ciccina rappellent les fères avec sa clochette repart en entendant Rosalia Orioles et la fille Marosa qui s’approchent des palmiers attirés par les bruits. [334-343]

SAUT DE LIGNE TYPOGRAPHIQUE QUI INDIQUE UN CHANGEMENT DE PARTIE

 

Deuxième partie

[A] Alors qu’il fait encore nuit, ‘Ndrja arrive à la maison. Dissimulé, il observe son père en train d’asperger de vinaigre la fère crue, et évoquer l’esprit de sa femme décédée (l’Acitana, car originaire d’Acì) disposant sur le lit l’une de ses robes, après s’être adressé à la Mort elle-même, l’apostrophant dédaigneusement au nom de Nasodicane (Nezdechien) et Nasomangiato (Nezbouffé). [344-351]

[B] Analepse sur la mort de l’Acitana (Amalia) et sur l’origine du délire visionnaire de Caitanello, et l’histoire de Simone Gaspiroso : disparu en août 1860 derrière les troupes garibaldiennes de passage pour le débarquement en Calabre, le jeune homme de 14 ans serait réapparu, vieillard, avec une étrange théorie ichtyologique sur la mort de l’âme véhiculée par le grondin volant (poisson-hirondelle en italien). [355-357] (b1) Pour ne pas déranger le délire de son père, ‘Ndrja divague autour du village (la Têtentenaille) et par association, par symbole, par parabole de la condition du vieil homme, il repense à la fois où il vit le spectacle déchirant d’un requin bleu (le vrai pélisquale) dont la queue est arrachée par les fères [363-372]. (b2) Comme il continue de tourner autour du village ‘Ndrja comprend qu’il doit revivre son passer pour expier la faute d’être rentré vivant de la guerre ; entendre son père prononcer le mot Granvisir en imitant maladroitement la voix de sa femme, lui évoque le temps de la famine ; en ce temps-là, l’Acitana appelait son époux ainsi lors des conciliabules nocturnes des parents qui brisaient finalement le mutisme collectif dû à la faim [372-401]. (b3) Comme Caitanello et Amalia se surnomment Granvizir et Madame, avant de s’aimer pour adoucir l’amertume de la famine de 1927, ils repensent à leur rencontre fabuleuse à Acireale [377-385].
L’évocation d’Acis et Galatée ; l’histoire du petit ‘Ndrja qui, une nuit, celle où il cessa d’être un enfant, après la mort de sa mère, avait pris sa place auprès de son père qui rêvait d’elle et l’appelait. [385-400]

[C] ‘Ndrja se présente finalement à son père, lequel rejoue la scène de la reconnaissance avec une obstination supérieure à elle de Pénélope, en ne se rendant à l’évidence (comme Laerte) que devant la cicatrice sur le poignet gauche laissée par un cordage [402-412]. Caitanello le reconnaît en lui palpant le corps, un peu comme Ciccina Circé, pour finalement s’effondrer en larmes. [412-418]

[E] – Après avoir découpé, mis à macérer dans le vinaigre et pendu à sécher cinq morceaux de ventrèche de fère, exhalant une insupportable odeur de sang mêlée de vinaigre et de gibier dans la chambràdormir, Caitanello souhaite lui dire deux petits mots, deux petits mots qui vont « devenir salamalecs, les mille et une nuits. » [418-422]

[En italique, les titres des « tableaux » tels qu’ils apparaissant dans I fatti della fera, puis éliminés]

T1 – Le soleil qui fit le jour le dix-sept [le huit dans les Fatti] août. Les Caréduits se réfugient sur l’Antinammare pour fuir le soleil et les bombardements [422-424] ;
T2 – Le soleil et la guerre qui jouent les rôles du mâle et de la femelle sur l’entredeuxterres. Caitanello personnifie la guerre en une vieille et laide prostituée aimée du soleil [424-425] ;
T3 – Tableau de l’épisode où l’on avait pu voir une impressionnante concentration de fères étrangères sur l’entredeuxterres. Comme dans une classique teichoscopie contaminée par le catalogue de Melville, le Délégué de plage, monsieur Cama, décrit aux pélisquales les fères étrangères et narre l’histoire du Grampe gris Pelorus Jack [425-446] ;
T4 – Tableau de l’épisode dans lequel l’air se fait sirocco, en conséquence de quoi une mer d’espadons arrive à l’entredeuxterres et les fères qui s’y tiennent en font un massacre [446-449] ;
T5 – Tableau de l’épisode dans lequel la famille entière Castorina, le père, la mère et leurs trois enfants, fut projetée en mer (sdiregnata) par une bombe tombée d’un avion, tableau que Caitanello lui peignait de couleurs de sang avec les fères toutes disposées à jouir du panorama [449-452].
T6 – Tableau dans lequel les fères prirent possession de plus d’eau encore, devant les gens, et beaucoup cette fois par le fait que le fameux Ferdinando Currò, qu’on assimilait à Noé lui-même, s’était donné la mort, aussi misérable que malvenue sous leurs yeux. Le long portrait de Ferdinando Currò et son suicide en mer avec trois autres anciens (nonnavi) [452-463] ;
T7 – Tableau et scène tragique que fait Caitanello della famère ou fèrfaim, c’est-à-dire de la faim à visage de fère. [464-470]. Subdivisé en trois sous-tableaux :
a) Caitanello voit en rêve les quatre anciens poussés au suicide par l’apparition de la faim sous la forme d’une fère d’horrible aspect ; la Ferfaim [464-466]
b) apparition de deux regrattiers infernaux, qui réclament en vain de a viande de fère aux pelisquales, qu’il parviennent finalement à manger ; [466-469]
c) les mèredefamilles sont les premières à s’abaisser à manger de la fère [469-470].
T8 – Tableau qui est comme le triomphe de la Ferfaim, où Caitanello lui montre six marins assassinés assis à un table dressée comme à un banquet de morts. La symbolique de la catastrophique vision de la tête de fère à la table des morts [470-475] ;

[F] Intermède : Ndrja se débat entre somme, veille et visions durant le chant du père, qui pour le tenir éveillé lui donne à manger et à renifler de la cervelle de fère cuite dans le vinaigre. L’œil mort de don Paola Castorina [475-480].

[E] T9 – Tableau où Caitanello Cambrìa qui, se sentant obligé, en imprudent Astolfe, commettait la forfanterie (sblasata) d’aller dans le camp d’Agramante c’est-à-dire de sortir sur cette mer infestée de fères roncevalesques [480-533]. L’entreprise en mer de Caitanello, le poignard maroquin et l’aileron de Manuncularais [480-510]. Le retour à Cariddi et la colère envers les compagnons ingrats [510-518] ; la poignée de main évitée et la métaphore du manchot Federico Scoma [518-531] ; la recherche puis la préparation de charogne de fère en mosciame, la proposition de faire la paix avec les pélisquales et la fin du chant de Caitanello qui serre la main droite de ‘Ndrja [531-533 ).

[G] Caitanello et ‘Ndrja vont dormir main dans la main [534-535].

[H] Le geste du père qui lui tend sa main rappelle à ‘Ndrja l’épisode de l’Allemand qui, le 29 septembre précédent, chassé par des voyous (napolitains) hors de son char d’assaut, a le geste fou de leur tendre la main avant d’être transpercé et tué d’un coup de baïonnette dans le ventre [535-547].

[I] Réveillé peu avant l’aube (dimanche 5 octobre) et comme guidé par un rêve dont il ne se souvient pas, (i1) ‘Ndrja va à la plage de la Ricchia (d’où son père avait lancé son expédition en mer et non loin du point où lui-même avait débarqué avec Ciccina Circé), se baigne au milieu des écueils, puis contemple la mer depuis la petite plage ; il observe le fères endormies et s’endort à son tour [547-552]. (i2) Le rêve du triste coït avec Ciccina Circé qui, transformée en sirène au visage de fère se retrouve amputée de sa queue par la lumière du soleil pénétrant dans dans la grotte de la Ricchia [552-557].

[J] Analepse qui explique le rêve. Histoire de Mimì Nastasi, le chanteur paralytique des sirènes homériques, et de sa dispute avec Cama, qui prétendait identifier les sirènes aux phoques ; le jeu des sirènes et des navigateurs de ‘Ndrja enfant et sa compagnie de gamins, peu à peu informés par Mimì Nastasi sur les sirènes comme génitrices des fères et des féminotes et sur leur rapport à la sexualité [568-573] ; les premières et traumatisantes expériences sexuelles de ‘Ndrja et de ses amis entre 1937 et 1938 : 1. avec la sirène-fère blonde et étrangère sur le jotto, avec son mari qui cherche en vain à payer les gamins pour le divertissement qu’ils ont donné à sa femme, après les avoir surpris qui lui faisaient l’amour tour à tour [573-588] ; 2. avec la Trapanèse sale et noirée, sur sa goélette puante, qui donne à ‘Ndrja la possibilité de voir pour la première fois comment est faite une femme les cuisses écartées, et qui tient caché le bédouin vérolé qui l’avait violée et déflorée [588-603] ; 3. finalement en juin 1940 avec les féminotes de Nicotera qui dérobent à l’équipée le meilleur poisson péché et transmettent la blennorragie à deux des trois amis de ‘Ndrja [603-606].

[K] Nageant vers la cataracte de la Ricchia (antre des sirènes dans les jeux d’enfants), ‘Ndrja est pris de fatigue ainsi que du sentiment solitude du revenant, qui lui rappelle les sirènes de la prise de Malte, contre lesquelles, le 10 septembre, les voix qui sortaient des hauts-parleurs d’une corvette mettaient en garde, et invitaient les marins à ne pas se rendre aux alliés mais à rejoindre au contraire les Allemands, au moment même où le Capitaine choisit une autre voie, celle de saborder le navire, en laissant les marins livrés à eux-mêmes [606-610].

[L] Rejoint par son père qui venait vider justement à la Ricchia le panier (gistra) des restes de fères qu’il avait tranchées à la maison, mettant ainsi fin à sa ségrégation volontaire, ‘Ndrja doit supporter les vanteries de gâteux de celui-ci au sujet de son audace contre Manuncularais et finit par sentir tout le poids du temps passé à la guerre et tombé sur leurs épaules à tous les deux [610-616].

SAUT DE LIGNE TYPOGRAPHIQUE INDIQUANT LA FIN DE LA DEUXIÈME PARTIE

 

Troisième partie

[A] Présentation de l’Orque assassine qui, concomitamment au retour de ‘Ndrja, se réveille pour la quatrième fois dans la mer de l’entredeuxterres, et qui vient annoncer catastrophes et malheurs avec sa figure monstrueuse et sa puanteur de pourriture depuis son arrivée dans le détroit, quatre jours auparavant.

[B] Le vieux Giulio Velardo, au premier coup d’œil, reconnaît sa puanteur de charogne due à une plaie grande comme un cercueil que l’animal a depuis des temps immémoriaux au flanc gauche, et raconte l’histoire de ses deux précédentes apparitions [623-624] : (b1) celle de 1918-1919 devant Nicotera, quand elle puait tant et roncevalla deux pauvres bateliers, père et fils [624-630] ; (b2) celle de deux ou trois années avant, devant Rasocolmo où Ferdinando Currò osa le harponner et fut traîné presque jusqu’à Malte avec son équipage, apprenant ainsi la révélation de son éternelle immortalité mourante [630)639]

[C] Monsieur Cama, avec son livre illustré, explique eux pélisquales que celui qu’on appelle féron, par analogie à la fère, et qui partage avec elle la queue plate se trouve être l’Orque assassine, la Mort incarnée [640-643].

[D] Luigi Orioles propose de tenter quelque chose pour libérer le détroit du monstre, qui constitue un danger aussi pour l’occupant anglais, alors que le théoricien Cama est contre, estimant que l’orque n’est là que de passage [643-648].

[E] Le lendemain (le 2 octobre) à l’aube, l’Orque offre un véritable spectacle aux pélisquales en opérant un carnage parmi les fères tout en montrant toute l’horreur de sa blessure ; Orioles et Cama exposent respectivement les ‘pro’ (l’Orque ne nuit pas aux hommes, mais les libère au contraire des fères, tandis que son immortalité la rend inoffensive et tristement solitaire) et ‘contra’ (le dragon réclamera des tributs toujours plus importants et exigera finalement l’espadon, ce qui perturbera leur économie, déjà difficile) de la présence de l’Orque dans le Détroit [648-659].

[G] Le lendemain (le 3 octobre), l’Orque offre aux pêcheurs une manne venue des abysses, faisant émerger et poussant vers le rivage une énorme naissain d’anguilles (la cicirella), provoquant stupeur et interrogations sur cette rencontre/affrontement (rencontre/scontre) entre un arcane de vie et un arcane de mort ; les fères odalisques font les galantes autour du tube moussant du jet de l’Orque imperturbable, pacha, afin de la séduire [668-672] ; le soir, nouvelle marée de cicirella [673].

[H] A l’aube du 4 octobre la manne de cicirella est telle que les femmes invoquent l’Orque comme si elle était une divinité bénigne et plusieurs pêcheurs songent à en faire commerce avec les regrattiers, mais Orioles et Villardo cherchent à les déciller [674-680] ; Cristina Schirò en vient même à soutenir que l’Orque est animée par l’esprit de Ferdinando Currò, et Cama la soutient suggérant que l’Orque a peut-être avalé son corps, en faisant une espèce de Jonas.

[I] A l’aube du 5 octobre, suite à une blague de trois gamins, qui donnent aux fères du pain trempé dans le vinaigre, celles-ci sont toutes éméchées ; l’Orque laisse le Détroit, suivi des fères étrangères et il semble que la normalité d’antan est revenue : les pêcheurs récitent les préparatifs du départ à la pêche, et les fères locales les attendent pour l’habituelle lutte à la régulière entre mortels qui s’affrontent loyalement, comme le soutient Orioles [685-699].

[J] AU crépuscule, tandis que l’Orque réapparaît après avoir fait le tour de la Sicile, une flotte de navires de guerre angloaméricaine, venant du sud, entre dans le port de Messine, et Orioles propose à Cama de refaire le truc des gamins de pain trempé dans le vinaigre [699-703].

[K] Le soir tard Orioles demnde à ‘Ndrja de se rendre vers Messine pour voir la situation et l’informer sur la manière d’acquérir une barque, qu’il voudrait utiliser pour affronter l’Orque, mais sa fille Marosa, promise (morosa) de ‘Ndrja, proteste [703-708].

[L] Analepse : rencontre dans l’après-midi entre ‘Ndrja et Marosa, laquelle, telle Pénélope, dans l’attente de l’aimé, a brodé des napperons avec les effigies de poissons de mer, en promettant à Dieu de continuer ce travail tant qu’il y en aurait et de ne pas manger ceux qu’elle n’avait pas encore brodés, en échange du retour de ‘Ndrja. Comme Ciccina Circé et Caitanello, la jeune femme le reconnaît en le palpant, et comme Bradamante elle le met à terre et le maintient immobile par le biais de la dispute (schermaglia) amoureuse [708-714].

[M] Le matin du 6 octobre, sur la route côtière, ‘Ndrja et son frère de lait Masino (deux mois plus tôt, à seize ans, ce dernier à affronté et tué trois Allemands avec une baïonnette) traversent un paysage dévasté par les bombardements et plein de femmes qui présentent des photos d’homme pas encore rentrés de la guerre [714-719].

[N] Entre Grotte et Ringo, ‘Ndrja et Masino aperçoivent le Maltais, accompagné de son homme de main, qui depuis un genre de carrosse s’adresse aux femme pour recruter pour cinq cents lires treize garçons de Messine pour une régate officielle organisée le samedi suivent par les Angloaméricains en station dans le port ; il finit par être chassé, sous les crachats, et accusé d’être un charlatan, parce que les hommes, elles, elles ne les voient plus que sur les photos et elles les pleurent à présent comme morts de guerre [719-730].

[O] Le Maltais propose la régate à ‘Ndrja contre mille lire, mais ce dernier veut d’abord voir clair dans le jeu du Maltais et comprendre surtout si cette somme suffit pour une palamitara [730-736].

[P] ‘Ndrja et Masino laissent le Maltais, quand il reçoit, grâce à la médiation de son homme de main, un groupe de féminotes-prostituées dans son carrosse, lesquelles étaient en train de charger des vêtements élégants sur leurs embarcations de contrebande [736-741].

[Q] Dans l’interlude, deux regrattiers, arrivés à Cariddi attirés par l’affaire des cicirelle et apprenant la présence de l’Orque, imaginent une affaire bien plus rentable, et engagent un louche personnage, l’ancienne Chemise Noire Dumdum, qui parvient à rouvrir la blessure de l’Orque grâce à des grenades (bomboîtes, bomboatte), si bien que l’animale s’éloigne de la Ricchia, d’abord suivi par un radeau anglais puis par les fères, qui intuitent la possibilité de profiter de la situation (blessure et évidente cécité) afin de se libérer de son encombrante présence. En le harassant de manière lubrique elles se relaient pour l’amputer de sa queue [741-758].

[R] A l’aube du 7, « Arriva alors Mars et ce fut mars vraiment pour l’orquafère. » Le grandiose et terrifiant tableau de la passion de l’Orque, attaquée par un nuage de fères, et horriblement mutilée, qui se destine à une mort certaine et non glorieuse [758-767].

[S] Quatre heures après. La longue et difficile agonie de l’Orque, devenue amusement ridicule des fères, et banquet de viande vive pour les sardines accourues par bancs comme si les fères les avaient appelées, qui en dévorent d’ailleurs une grande partie [767-770].

[T] A midi, les fères portent l’orque au niveau de la ligne tourbillonnante et agitée des deux mers, qui s’y abîme comme un wagon de marchandises quitte les rails, provoquant une marée qui fait émerger et échouer toutes sortes de déchets et de charognes, parmi lesquels un cadavre défiguré qui rappelé à ‘Ndrja son ami suicidé Pirri [770-776].

[U] A deux heures de l’après-midi les pêcheurs discutent de la manière dont se débarrasser de la carcasse de l’orque (orcarcasse, orcarogne) quand elle sera définitivement morte ; ils étudient les différentes possibilités : trop difficile de l’enterrer sur le rivage ; trop dangereux de la faire couler, car elle aurait contaminé les cicirelles et les œufs d’anguille, unique source de vie restée miraculeusement intacte ; faut-il la dévier au loin vers Malte ? la faire sauter en l’air en pleine mer ? Improbable que les Anglais s’y intéressent ; avantageux de la confier aux regrattiers afin qu’ils l’écoulent pour leur propre compte. C’est ‘Ndrja qui lance la proposition, sans en être trop convaincu ; devant l’enthousiasme de presque tous, il réalise que c’est le monde à l’envers : les pêcheurs sont prêts à aller contre leur propre nature à cause de la misère matérielle et morale où les a précipités la guerre ; mais Orioles freine les enthousiasmes en leur rappelant une impossibilité de principe pour eux d’être vendeurs ambulants, à cause de l’administration corrompue (giunta truffaldina). Intervient alors Cama, qui trahit sa nostalgie maritime ainsi que sa déception d’avoir trop vanté l’immortalité de l’Orque, et qui soutient qu’ils ont affaire en réalité à une Pseudorque ; il montre aux autres deux photos d’orques dont s’occupent les pêcheurs du détroit de Béring, il les exhorte à en utiliser chaque partie pour en extraire les peaux, le gras, l’huile, des peignes, des couverts, des assiettes des couteaux ou des sabots [787-798]. Mais les espoirs des pêcheurs d’avoir enfin quelque chose à faire (un affaire, un daffare) avec le dépeçage de l’orque, après trop d’inactivité due à la guerre, et alors que les gabians commencent à récupérer la cicirella encore accrochée à l’imposant corps et que les autres charognards patientent son dernier souffle, les espoirs sont suspendus à l’arrivée du radeau anglais avec deux types en civil ; le Maltais et son homme de main [786-806].

[V] L’homme de main débarque tandis que l’Orque, en un ultime et terrifiant sursaut digne de sa renommé d’orcinusa, se libère du vortex de la ligne des deux mers et fait une hécatombe (mesdea) de fères [806-812].

[W] ‘Ndrja pense demander au Maltais, en échange de son engagement comme rameur, d’intercéder auprès des Anglais, alors que ceux-ci se dirigent vers l’Orque, afin qu’ils laissent la carcasse aux pêcheurs [812-813]. Avant de se présenter aux pêcheurs méfiants, l’homme de main a une altercation avec un vieillard et trois garçons arrivés tout essoufflés sur la plage [813-817] ; il exhibe les mille lires promis par le Maltais et se justifie en expliquant que le vieux et les gamins étaient des importuns attirés par le mirage du lot de 500 lires, il passe parmi les pêcheurs en vante les qualités athlétiques de ‘Ndrja, qui tout en menaçant le libidineux nervi du Maltais, songe à accepter l’offre si elle lui est faite par le Maltais lui-même et qu’il s’engage à faire échouer l’Orque pour donner un affaire aux pélisquales. [817-828]

[X] Le monologue sur le mole [828-993] : ce passage particulièrement long et difficile est en cours de relecture

Reprise de l’action interrompues p 828.

[Y] Tandis que le radeau anglais s’approche de la rive, ‘Ndrja propose d’acheter à Armando Raciti une palamitara avec les mille lires de la régate mais seuls Orioles et Masino sont intéressés, les autres étant trop occupés à regarder la mer, un œil au radeau et un autre à l’Orque, et quand le Maltais débarque il va à leur encontre leur annonçant la surprise de faire échouer l’Orque sur le champ [993-1001].

[Z] Dans la longue minute de conversation avec le Maltais, qui se démontre très heureux de rendre service aux pêcheurs, ‘Ndrja a l’occasion d’observer Marosa qui brode assise devant la porte de sa maison et de considérer que, comme lui avait dit Ciccina Circé [341], à laquelle il ne cesse de penser, ces féminelles aux culassis de peu de foi sont toujours piquées de désir, avec lequel elles tiennent l’homme lié à la maison et le tirent à elle quand ils sont loin, et que la jeune femme, se rendant compte que son promis allait partir pour un voyage sans retour parce qu’à Messine on pourrait le faire emprisonner avec l’excuse de la régate, cette fois s’était mise à broder la silhouette de l’Orque [1001-1004].

[AA] Avant le coucher de soleil, les pêcheurs, très occupés, embarquent sur le radeau pour aider à tirer l’orque [1004-1005].

[AB] Trompés par l’expulsion mécanique de sang, d’air et d’eau de l’évent, à cause du courant qui entre dans la carcasse par la blessure, les anglais déchargent leurs mitraillettes sur l’orque, mais les pélisquales comprennent qu’elle est morte depuis une heure environ et que ce mouvement dans le courant et ce faux souffle ne sont qu’un reste de sa fame d’immortalité, qui semble maintenant également contaminer les Anglais.

[AC] Pour démontrer aux Anglais que l’orque est bel et bien morte, Masino, plus rapide que ‘Ndrja, plonge pour aller boucher avec de l’étoupe l’évent de l’animal, qui est ensuite lié par les dents et traîné jusqu’au rivage, non sans avoir dévoilé son dernier mystère : une tache blanche en forme de cœur sous la gueule. Pendant le remorquage, les pêcheurs constatent, joyeux et émus par le retour de la nature à ses cycles fatals, « leurs beaux, tréséternels spades et spadins » Une fois ensablée, l’Orque se montre dans la lumière incertaine vacillante du crépuscule dans tout son aspect effrayant de mort et de lacération aux Caréduits caridotti émerveillés, accourus en masse sur la rive pour donner un coup de main pour la mettre au sec et pour la nettoyer de la cicirella qui la recouvre [1012-1019]

[AD] Après le congé aux pêcheurs et surtout à son père et Orioles, qui lui recommande la prudence et qui le marque par la façon dont lui aussi se laisse prendre à l’entreprise du saccage autour de la charogne de l’Orque, ‘Ndrja va saluer Marosa. Pleurant, celle-ci s’est mise à broder non pas l’Orque, comme lui l’insinue pour rire, mais le cœur noir du promis (zito) à cause de la douleur due à son nouveau départ, de sorte que Ndrja, lui offrant sa poitrine nue comme un Ecce homo pour se faire coudre dessus « un cœur de cuir sur le cœur de chair », pour le consoler il se promet comme mari chef de bateau à son retour de la régate et de Galati Mamertino où il sera allé commander la palamitara [1020-1026]

[AE] Monté le soir sur le radeau, ‘Ndrja sourit en voyant les pêcheurs qui s’activent autour de l’Orque, maintenant si froide qu’elle ne sent plus fort, puis il demande au Maltais deux autres faveurs : qu’il recrute aussi Masino pour la régate (il ne se le fait pas demander deux fois) et que lui-même aille donner au vieux sous la Lanterne les 250 lires de compensation pour avoir donné en humiliant spectacle au nervi, au Maltais et à Barberouge, son pénis énorme, qu’il avait sorti pour en frapper le nervi qui lui avait pissé dessus sans le prévenir (et à Ndrja le vieux canneàétendre rappelle Caitanello quand il brandit son affairechinoise contre les fères dans son aventure nocturne en mer : 493-499) [1026-1032]

[AF] Le radeau prend son départ et ‘Ndrja entend la voix de Marosa qui l’appelle depuis la rive par son prénom et son nom, tandis que les fères qui nagent autour de l’embarcation lui donnent la sensation de se retrouver encore sur la barque de Ciccina Circé pendant la traversée [1032-1035]

[AG] Débarqués sur la placette de Torre Faro, ‘Ndrja et Masino montent à bord d’un camion avec d’autre jeunes hommes engagés pour la régate ; ‘Ndrja refuse que le Maltais contrôle les mains des garçons pour vérifier s’ils ont bien déjà ramé, et tout à coup il entend le son de la jambe de bois de Boccadopa, qui obtient du nervi de pouvoir monter lui aussi dans le camion avec Portempedocle. Ce son sinistre rappelle à ‘Ndrja la dernière fois qu’il l’a entendu, sur la plage des féminotes, avant de rencontrer Ciccina Circé (267sq) [1035-1042]

[AH] ‘Ndrja n’a pas le temps de s’arrêter sur Boccadopa et Portempedocle, qui à peine montés dans le camion tombent balourdement terre, qu’il entend venir de dehors le son de la cloche de Ciccina Circé. Celle-ci, dans la petite caserne, « tout autre que que milléunenuit, tout autre qu’arcalameque », comme elle lui apparaissait dans ses rêves mythisants et amoureux, était devenue la videcouille des Anglais qui, dans cette petite bacchanale, lui chantaient en cœur Rosamunda (prenant ainsi la place des dauphins hypnotisés par les clochettes), et ils se la refilaient à tour pour quelque caresse. Après qu’elle finit à terre dans la tentative de courir après le camion, ‘Ndrja ayant demandé à Masino de l’appeler par son nom (mais sans la traiter de putain), si bien que Portempedocle reconnaît son Moïse et Boccadopa lui reproche de les avoir abandonnés aux féminotes qui leur ont fait avaler le thon, leur provoquant ainsi une terrible diarrhée, et leur ont pris tout ce qu’ils avaient de valeur en échange de la traversée [1042-1052]

[AI] ‘Ndrja passe la nuit avec les autres dans la Casa Littorio de Messine, un local sale et éventré par les bombardements, et avant l’aube, après avoir entendu des tirs là où se trouvent les sentinelles anglaises devant les navires de guerre, il assiste à a mort d’un refourgueur de cigarettes entré dans l’édifice blessé au cou, et il voit tous les gamins rameurs ses compagnons fuir terrorisés [1052-1055]

[AJ] Aux premières lueurs du 8 octobre (mercredi), ‘Ndrja et Masino vagabondent dans une Messine en ruine, seuls et sans espoir de pourvoir faire la régate en raison du départ des autres rameurs ; de fait ils décident d’aller à Galati chez don Armando Raciti ; ils trouvent une place dans un camion d’oranges et arrivent à son atelier vers neuf heures. Là ils assistent à un spectacle pénible : le charpentier de marine qui a seulement 37 ans est devenu une larve humaine à moitié paralysée, muette et abêtie ; c’est sa pauvre femme qui s’occupe de la construction des palamitare avec n’importe quel bois apporté par le client ; pour donner l’illusion qu’il est encore en vie, elle fait semblant d’être guidée par lui dans les différentes phases du travail, en lui posant des questions à l’oreille et feignant de lire sa réponse sur ses lèvres, d’où le souffle lui sort avec difficulté [1055-1063]

[AK] Revenu à Messine vers midi, ‘Ndrja et Masino retrouvent les gamins au balcon du siège du Mouvement indépendantiste Sicilien, puis rencontrent le Maltais, qui les amène manger dans une taverne du port ; là le Maltais leur raconte qu’il a licencié le nervi, parce que celui-ci, en plus de faire empocher au frère et au neveu le prix de la régate, ne lui envoie que des joueurs de lansquenet débauchés et ramollis qui aux répétitions suscitent l’hilarité des athlètes anglais et américains, et il a donc décidé de ne plus collaborer avec le Tauro Maggiore ; mais ‘Ndrja, notant qu’il est éméché, le convainc de réessayer avec les gamins d’avant et il envoie Masino les chercher ; entre-temps il va avec le Maltais à la Mer Sèche de San Ranieri, où il peut admirer la belle embarcation confiée à l’équipage italien pour la régate [1063-1073]

[AL] Mélancolique et sans plus de confiance, le Maltais insiste pour que Ndrja accepte les 1000 lires même sans régate, mais celui-ci refuse un prix non gagné par un travail fixé et lui rappelle être en dette envers lui pour avoir sortie l’Orque hors de l’eau ; alors le Maltais lui demande de gagner mille lire en lui lisant le journal de guerre, et quand ‘Ndrja lui lit la situation de Cassino, le Maltais joue sur le jeu de mot Cassino/casino (bordel) ; arrivent alors les jeunes avec Masino, lequel explique qu’il les a récupérés alors qu’ils étaient toujours au siège de la MIS, où quelqu’un leur enseignait que la Sicile était une île, et qu’il les a convaincus de le suivre en leur rappelant leur engagement envers ‘Ndrja [1073-1078]

[AM] Pris d’enthousiasme, ‘Ndrja entraîne l’équipe sur le champ, et il blague avec Masino au sujet de la surprise des Caréduits s’ils venaient tous les deux avec ce formidable bateau leur demander la carcasse de l’Orque en échange. Il fait déjà sombre et en repassant le parcours de la régate, ils s’approchent trop près de la proue d’un porte-avions anglais (qui fait frontière). La sentinelle fait partir un coup que ‘Ndrja semble accueillir volontairement dans les yeux. Désespérés et en larmes, Masino et les gamins rament enragés en pleine mer pour ramener à la maison le corps de ‘Ndrja [1078-1082]